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Translating the “Covered Bridges” in Barbara Kingsolver’s Short Stories

In all the examples below the column on the far left is taken from Barbara Kingsolver’s stories (BK), the middle one from Michèle Lévy-Bram’s translations (MLB) and the column on the far right from my own translations of Kingsolver’s stories (BM).

Quote 1:

Lydia can’t relate. People often find Bogtree – her own last name – humorous, but growing up with it has planted in her imagination a wonderful cypress tree spreading its foliage over a swamp at the dawn of the world. She believes she got this image from a James Weldon Johnson poem containing the line “Blacker than a hundred midnights down in a cypress swamp.” Lydia was the kind of child who knew “bog” meant swamp. The poem was about the creation of the earth. “I’ve always been a Bogtree and always will, don’t blame me,” she says, [...] (BK “Blueprints” 30) / Lydia ne voit pas pourquoi. Elle, son patronyme est Bogtree*, que les gens tendent à trouver ridicule. Pourtant, grandir avec lui a fait germer dans son imagination un arbre ami de l’ombre qui, au matin du monde, déploie son feuillage au-dessus d’un étang. Peut-être a-t-elle emprunté cette image à un poème de James Weldon Johnson: Blacker than a hundred midnight [sic] down… the swamp... «J’ai toujours été une Bogtree et je tiens à le rester. Ne me le reproche pas» […] (MLB «Histoire Naturelle» 38-39)
*Arbre ombrotrophe, qui pousse dans les marais. / Lydia n’arrive pas à le comprendre. Les gens trouvent souvent Bogtree* (son propre nom de famille) plein d’humour, mais grandir avec ce nom a planté dans son imagination un merveilleux cyprès dont le feuillage s’étend au-dessus d’un marécage à l’aube du monde. Elle pense à présent avoir tiré cette image d’un poème de James Weldon Johnson qui contient le vers: «Blacker than a hundred midnights down in a cypress swamp.*» Lydia était le genre d’enfant à savoir que «bog» était synonyme de swamp*. Le poème traitait de la création du monde. J’ai toujours été une Bogtree et je le resterai, ce n’est pas de ma faute, dit-elle. (BM «Esquisses et empreintes»)
*Littéralement: Arbre-des marais.
*Plus noir qu’une centaine de minuits au fond d’un marécage de cyprès.
*Marais et marécage.

Quote 2:

“Don’t dive into the river, he says, or “I’m not going to throw myself in the river,” or something along those lines, spreading his arms in the charade of a swan dive and shaking his head “no.” He indicates a horizontal circle: that he will come around to where she is. She should stay there. He seems embarrassed. He points both his hands toward Lydia, and then puts them flat on his chest. / They are using a sign language unknown to humankind, making it up as they go along. She understands that his last gesture is important, and returns it. (BK “Blueprints” 41) / - Ne te jette pas à l’eau car je n’irai pas te chercher», crie-t-il. Ou quelque chose dans ce goût-là. Il illustre ses propos par le mouvement du cygne qui plonge, puis secoue vigoureusement la tête en signe de dénégation. Il trace ensuite dans l’air un cercle indiquant que c’est lui qui viendra à elle. Que, surtout, elle ne bouge pas. Visiblement confus, il tend les mains vers elle puis les pose à plat sur sa poitrine, comme s’il disait: «C’est ma faute». / Ils utilisent un langage des signes inconnu des humains. Un langage qu’ils inventent, poussés par la nécessité. Comprenant que le dernier signe est important, elle le lui rend. (LMB «Histoire naturelle» 50) / «Ne plonge pas dans la rivière», dit-il, ou «Je ne vais pas me jeter dans la rivière», ou quelque chose de cet ordre-là, écartant les bras comme pour mimer un saut de l’ange*, et faisant «non» de la tête. Il dessine un cercle horizontal: il va faire le tour pour la rejoindre. Qu’elle reste là. Il semble gêné. Il tend les deux mains vers Lydia, puis les pose à plat sur sa poitrine. / Ils se servent d’un langage de signes inconnu des hommes, qu’ils inventent au fur et à mesure. Elle comprend que ce dernier geste est important, et le lui renvoie. (BM «Esquisses et empreintes» )
*Saut de l’ange est ici traduit par équivalence, de «swan dive» en anglais, soit littéralement, le plongeon du cygne.

Quote 3:

Also I am a great gardener. Some would call it puttering, but I feel that I commune with nature in the tradition of many great thinkers: Thoreau, Whitman, Aristotle. My communion is simply more domestic. I receive inspiration from cauliflowers. ( BK “Covered Bridges” 44)

Quote 4:

I pulled Lena into my arms and held her tightly, thinking of strange things: of diatomaceous earth and insects and the choices we make, and of eggplants, purple and bright in the sun. (BK “Covered Bridges” 63) / J’attire Lena à moi et la serre fort dans mes bras tout en songeant à la bizarrerie de la vie – la diatomite, les insectes, nos choix personnels, et les aubergines pourpres qui luisent au soleil. (MLB «Toxique» 72) / J’attirai Lena vers moi et la serrai dans mes bras, songeant à des choses étranges: à de la diatomite et des insectes, et aux choix que nous faisons, et à des aubergines*, violettes et éclatantes dans la lumière du soleil. (BM «Les ponts couverts»)
* Dans le texte original, Kingsolver utilise ici pour aubergine le mot de l’anglais américain «eggplant» qui signifie littéralement «plante-œuf».

Quote 5:

[My mother] thinks I am Jezebel. That discovery of hers in my bureau really started us out on the wrong foot. (BK “Stone Dreams” 81) / […] elle me prend pour une Messaline. Sa découverte dans mon tiroir de commode nous a fait prendre un mauvais départ. (MLB «Songes de pierre» 92) / […] elle me prend pour Jézabel. Sa première grande découverte dans ma commode fut vraiment un mauvais départ pour toutes les deux. (BM «Rêves de pierre»)

Quote 6:

Last year she filled up a little notebook, studying Mother and her rook-playing cronies like Margaret Mead among the Samoans. I was floored to see my mother, policewoman of my adolescence, reduced to a list of quaint phrases. (BK “Stone Dreams” 79)

Quote 7:

I hated to admit Nathan was right, but they had no business calling this a forest. It reminded me of a Biblical disaster area – a tribe of toppled-over women who’d all looked back and got turned into pillars of salt. (BK “Stone Dreams” 97) / Je m’avoue avec réticence que Nathan avait raison. Je trouve toutefois abusif, mensonger même, d’appeler cela une forêt. C’est plutôt une zone sinistrée sortie de la Bible, où il y aurait non une, mais toute une tribu de femmes «tombées» pour s’être retournées, transformées en statue de sel. (MLB «Songes de pierre» 108) / J’étais furieuse de devoir admettre que Nathan avait raison, mais il n’y avait vraiment pas lieu d’appeler cela une forêt. Cela me faisait penser à la scène d’un désastre biblique: une tribu de femmes renversées, qui avaient toutes regardé en arrière et avaient été changées en colonnes de sel. (BM «Rêves de pierre»)

Quote 8:

I sat on the picnic table hugging my knees, out there in the pitch dark with nothing familiar over my head but my mother’s garden of stars. The roaring in my ears, I knew, wasn’t going to stop. It wasn’t from the drive. It was the crashing of the petrified forest. Stone limbs were dropping heavily and straight to the ground; trunks crumbled, and granite leaves splintered like glass. When it was over, there would be only Julie and me left standing in the desert, not looking back. (BK “Stone Dreams” 99) / Je suis toujours assise à la table de pique-nique, les genoux entre les bras, sous ce ciel qui ne m’est pas familier, avec le jardin d’étoiles de ma mère pour seul repère. Je sais que le grondement que j’ai dans les oreilles n’est pas prêt de s’arrêter. Ce n’est pas la route qui l’a provoqué. C’est le fracas que fait la Forêt pétrifiée en tombant. Des branches de pierre s’écrasent lourdement au sol, les troncs s’affaissent; les feuilles de granite se brisent en éclats. Quand ce sera fini, il n’y aura plus que Julie et moi debout dans le désert.
Nous ne nous retournerons pas. (MLB «Songes de pierre» 110) / J’étais assise en boule sur la table de pique-nique serrant mes genoux dans mes bras, là-dehors dans la nuit noire sans rien au-dessus de ma tête que le jardin d’étoiles de ma mère. Le bourdonnement dans mes oreilles, j’en étais sûre, n’était pas prêt de cesser. Cela ne venait pas du trajet. C’était l’écroulement de la forêt pétrifiée. Des membres de pierre s’écrasaient au sol avec fracas; les troncs s’effondraient en miettes, et les feuilles de granit se craquelaient comme du verre. Quand tout serait fini, il ne resterait plus que Julie et moi, seules survivantes au milieu du désert, nous tenant debout sans regarder en arrière. (BM «Rêves de pierre»)

Quote 9:

I had carried with me a fascination for the Petrified Forest. I can’t imagine how I even knew of its existence, but in sixth grade I wrote a poem about it. It was deemed excellent, and I was required to read it to the entire class. […] I remember a line about the “twisted igneous of their trunks, their glistening granite leaves.” […] I believe I even had their firm branches offering shelter to stone deer and little stone squirrels. I’d had such splendid confusions about the geological world back then, before marrying a man who’d minored in igneous and granite. (BK “Stone Dreams” 88)

Quote 10:

But it wasn’t even trees, just trunks, scattered here and there over the desert. Not even whole trunks, really, just short lengths of log toppled over and broken into parts. “Take Nothing but Pictures, Leave nothing but Footprints,” […] (BK “Stone Dreams” 97) / Mais ce ne sont pas des arbres, juste des troncs éparpillés dans le désert. Parfois, pas même des troncs entiers, mais de simples amas de bûches dont certaines se sont cassées en tombant dans la pile. «CONTENTEZ-VOUS DE PRENDRE DES PHOTOS ET DE LAISSER L’EMPREINTE DE VOS PIEDS» (MLB «Songes de pierre» 108) / Mais il n’y avait pas d’arbres, juste des troncs, éparpillés ça et là dans le désert. Pas même des troncs entiers, vraiment, juste des petits tronçons renversés et brisés en plusieurs morceaux. «Ne prenez rien d’autre que des photos, Ne laissez rien sauf vos empreintes» (BM «Rêves de pierre»)

Quote 11:

When it became clear that Peter and I were going to have a clandestine adventure, it seemed fitting that we should go to the stone forest of my dreams. (BK “Stone Dreams” 88) / Quant il devînt clair que Peter et moi allions avoir une aventure clandestine, il nous sembla approprié qu’il m’aidât à réaliser mon rêve de gosse. (MLB «Songes de pierre» 99) / Lorsqu’il devint clair que Peter et moi allions nous lancer dans une aventure clandestine, il me sembla de mise de nous rendre à la forêt de pierre de mes rêves. (BM «Rêves de pierre»)

Quote 12:

I can’t see staying in my marriage, but neither could I ever be the one to bring it down just to please myself. Nathan would say I was selfish, and he would be right. All I can imagine for certain is Nathan’s anger, the roof caving in and plate glass flying as the house implodes on itself the way a light bulb will when the vacuum inside is disrupted. (BK “Stone Dreams” 93) / J’imagine le séisme que cela provoquerait si je lui annonçais que je le quittais: sa colère, le toit qui s’effondre, les morceaux de baies vitrées volant partout, bref, la maison entière implosant comme une ampoule électrique sous l’effet d’un faux contact dans l’aspirateur. (MLB «Songes de pierre» 104) / Tout ce que j’arrive à imaginer avec certitude c’est la colère de Nathan, le plafond qui s’effondre, le double vitrage qui vole dans tous les sens et la maison qui implose sur elle-même à la manière d’une ampoule électrique dont le vide à l’intérieur est dérangé. (BM «Rêves de pierre»)

Quote 13:

The other students would ask these questions that made the professors pause and reflect, and they’d see symbolism without having it pointed out, but I just couldn’t conceive of anything beyond what I saw on the page. I kept thinking there was some explanatory brochure I’d forgotten to pick up during registration. (BK “Stone Dreams” 84) / Les autres étudiantes posaient le genre de questions qui obligent le professeur à interrompre son cours pour réfléchir, mais elles n’avaient pas besoin de sa réponse car elles avaient déjà détecté le symbolisme sans qu’il fût besoin d’explications. Moi, en revanche, je ne voyais jamais rien au-delà de ce qui était écrit sur ma page. Je ne pouvais m’empêcher de penser que j’avais omis de ramasser quelque brochure explicative lors des inscriptions. (MLB «Songes de pierre» 95) / Les autres étudiants posaient toujours des questions à la suite desquelles les professeurs devaient marquer une pause et réfléchir, et ils voyaient le symbolisme sans qu’on le leur montre, alors que moi, je ne pouvais rien concevoir au-delà de ce que je voyais sur la page. Je me disais toujours qu’il devait y avoir une sorte de brochure explicative que j’avais oubliée de prendre au moment des inscriptions. (BM «Rêves de pierre»)

Quote 14:

A young Navajo woman in a Smokey Bear hat at the park entrance handed us a brochure, “There’s a map of the auto route in your brochure,” she said. “There are nine stops. Please stay on the trails, and have a good day. (BK “Stone Dreams” 96) / A l’entrée du parc national; une jeune Navajo coiffée du chapeau de gendarme dont est affublé l’ours Smokey sur les affiches de prévention des incendies de l’Office des forêts, nous tend un dépliant touristique. «Voici l’itinéraire que vous allez suivre en voiture, nous dit-elle. Il y a neuf arrêts. Merci de rester sur le chemin. Je vous souhaite une bonne journée.» (MLB «Songes de pierre» 108) / Une jeune Indienne Navajo qui portait un chapeau Smokey Bear nous tendit une brochure à l’entrée du parc: «Votre brochure contient une carte routière, dit-elle. Il y a neuf arrêts. Veuillez rester sur les parcours balisés, et passez une bonne journée.» (BM «Rêves de pierre»)

Quote 15: