international conference

NOUVEAUx MUSEES, NOUVELLES eres URBAINES, NOUVELLES MOBILITES TOURISTIQUES

New museums, new urban eras, new tourism mobilities

AXE 2: Le Musée et ses échelles d’inscription, entre icône urbaine et moteur de développement territorial

Carey Simon, Davidson Lee, Sahli Mondher

Victoria University of Wellington, New Zealand

«Capital City Museums and Tourism Flows: an Empirical Study of the Museum of New Zealand Te Papa Tongarewa»

Although cultural attractions are often promoted for their contribution to urban economies, few studies have investigated the impact of new museums on the growth of urban tourism. This study examines the role that the Museum of New Zealand Te Papa Tongarewa has played in the growth of tourism in New Zealand’s capital city, Wellington. It takes a time series analysis approach to determine the extent to which the opening of Te Papa in 1998 contributed to tourism growth in the city. Combining monthly data on Te Papa visitors and tourist arrivals, the study examines the long-term relationships between cultural tourism and tourism flows over the 1998-2009 period. Tourist activity is measured by four variables – guest arrivals, length of stay, overnight stays, and the occupancy rate – where the latter two are also disaggregated by accommodation type (hotels, motels, backpacker accommodation, etc). A series of simple econometric regressions, which account for non-stationarity and seasonal issues in the data, were conducted to determine the true impact of Te Papa on tourism in the Wellington region. Our primary findings show that Te Papa has had a positive impact on Wellington tourist arrivals and overnight stays (for hotels and motels, but not for backpacker accommodation). These results contribute valuable empirical evidence of the positive role of museums as cultural sites in attracting tourists to urban centres.

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CORRAL-Regourd Martine

Professeure en Sciences de l’Information et de la Communication, Université Toulouse 1- Capitole. Institut du Droit de l’espace, des territoires et de la Communication (Idetcom) EA 785

«Le musée Soulages entre économie de l’immatériel et recomposition des territoires»

Sur la base d’un don de l’artiste, la création d’un musée Soulages est en préfiguration à Rodez, dans l’Aveyron. Ce projet est présenté comme «l’accès immédiat à la notoriété universelle» par les représentants de la communauté d’agglomération du Grand Rodez, porteuse du projet. En termes d’attractivité du territoire la recherche de «l’effet Bilbao» est clairement assumée, confirmée par le projet architectural confié à l’agence catalane RCR Aranda-Pigem-Vilalta. Musée «starchitecturé» qui doit concilier visibilité internationale, et valorisation de l’environnement naturel de l’Aubrac.

Cette communication se propose d’analyser les effets d’un «un événement culturel- muséal» selon une double perspective.

D’une part, analyser comment ce type d’événements, compte tenu de l’importance du don et de la notoriété de l’artiste produit des effets avant même son ouverture selon quasiment une logique de marque: le «label Soulages». Au regard duquel l’attribution du label «musée de France» avant toute réalisation, apparaît essentiellement comme un moyen de drainer des financements et de souligner combien il est important pour l’Etat de conserver dans son giron ces établissements qui apparaissent comme emblématiques de l’économie de l’immatériel, garante selon le rapport Levy-Jouyet de la croissance de demain et permettant de positionner le territoire au plan international.

D’autre part montrer comment dans ce type de projet intervient le musée intervient comme média au service de la recomposition des territoires. Ce projet est pensé comme un catalyseur pour renforcer la dynamique urbaine, sociale et économique du Grand Rodez et ainsi la structure intercommunale elle-même. Recomposition des collections des musées municipaux ruthénois et réorganisation sous la tutelle unique du Grand Rodez et conjointement spécialisation du territoire. À l’échelon régional, la détermination d’un pôle de rayonnement culturel muséal permet aussi de conférer davantage de lisibilité et de cohérence à la politique culturelle régionale, selon des indicateurs prévisionnels plus que sur des critères scientifiques établis.

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FABRY Nathalie, ZEGHNI Sylvain

- Fabry Nathalie, Maître de Conférences-HDR en Economie, Université Paris-Est, Membre du laboratoire EIREST (Equipe Interdisciplinaire de REcherches Sur le Tourisme) de l’Université de Paris1 Panthéon-Sorbonne.

- Zeghni Sylvain, Maître de Conférences-HDR en Economie, Université Paris-Est, Membre du laboratoire EIREST (Equipe Interdisciplinaire de REcherches Sur le Tourisme) de l’Université de Paris1 Panthéon-Sorbonne.

« La stratégie d’internationalisation des musées»

Avec la mondialisation, les musées, comme les entreprises, tendent à s’internationaliser par le biais d’implantations de filiales à l’étranger. L’objet de cette communication est d’analyser les ressorts de cette stratégie d’implantation pour les musées mais aussi d’analyser l’impact, en termes d’image et de retombées économiques, pour les territoires qui les accueillent.

Dans un premier temps, nous ferons une typologie des stratégies d’internationalisation des musées. Certains créent/construisent des filiales, d’autres pas. Dans le premier cas (Le Louvre, Guggenheim, Tate, Ermitage), il s’agit de vendre sa marque à l’international ce qui n’exclut pas des politiques de coopération entre deux marques comme par exemple l’Ermitage et Guggenheim. Dans le second cas, souvent des fondations (Barnes, Beyeler, Gianadda, …), c’est le touriste qui se déplace dans un lieu unique. Bien entendu cela n’exclut pas que les collections voyagent occasionnellement.

Les filiales des grands musées à l’étranger hébergent des collections permanentes, ou misent sur les expositions temporaires voire les deux à la fois. Ainsi, les filiales de l’Ermitage sont essentiellement des lieux d’accueil des expositions de l’Ermitage plus que des lieux d’expositions permanentes. De plus, certaines filiales «marquent» les lieux de leur architecture, au point de devenir une destination en soi.

Au-delà de ces différences se pose, d’un point de vue théorique, la question de savoir si les déterminants de l’internationalisation des entreprises peuvent s’appliquer totalement ou partiellement aux musées. C’est ce que nous ferons en nous basant sur la théorie éclectique de l’internationalisation des entreprises de Dunning (2000).

Enfin, nous nous demanderons quelle est la nature de l’ancrage au territoire de la présence de ces filiales. Est-ce le musée qui fait la destination donc son attractivité (Bilbao) ou est-ce la destination qui attire le musée? C’est la question du primat de la logique économico-fiscale sur la logique culturelle et touristique qui est posée.

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Garnero Morena Christiane

Analyste territoriale

«Projet de création d'un musée original dans le contexte cambodgien. Musée du territoire de Preah Vihear»

Le contexte historico géographique

L'ensemble archéologique de Preah Vihear date de l'époque Angkorienne. Il est situé sur l'un des points culminant de la chaîne frontière avec la Thaïlande des Dangerek, à environ 150 km au Nord d'Angkor.

Longtemps disputé entre les deux pays, il a été l'un des derniers retranchement des khmers rouges.

Le contexte de création d'un musée

Faisant suite à l'inscription au Patrimoine mondial en 2008 du deuxième site du royaume: le Temple de Preah Vihear, situé sur la ligne de crête des Dangerek,frontière avec la Thaïlande,le gouvernement cambodgien à souhaiter y créer un musée pour valoriser le monument et sa région, et effacer les traces de la récente période des khmers rouges qui ont particulièrement meurtries ce territoire ( mines anti personnes).

L'UNESCO a été appelé pour participer à la réalisation du projet scientifique.

Le projet scientifique

Pour le Cambodge non seulement le concept de musée territorial est nouveau, mais aussi suite aux vicissitudes de l'histoire, seule la composante archéologique, semblait réalisable en fonction des fonds conservés et des compétences scientifiques présentes dans le pays .

Cependant le souhait de favoriser un développement des populations locales en créant une attraction culturelle autorisant un tourisme à la fois national et international était en gestation dans l'esprit des responsables du projet de mise en valeur de ce territoire: l'Autorité Nationale de Preah Vihear.

Le bureau UNESCO de Pnomh Phen a proposé d'inviter en décembre 2009 des experts internationaux à l'occasion du CIC d'Angkor, pour réfléchir au projet scientifique du musée. C'est à cette occasion que j'ai été amenée à visiter le site et sa région et à faire la proposition, acceptée par les responsables cambodgiens et soutenu techniquement par l'UNESCO, d'y réaliser non seulement un musée d'archéologie, mais un musée qui prendra en compte toutes les strates de l'histoire du territoire en interaction avec le complexe archéologique de Preah Vihear et les populations qui en ont fait et font encore aujourd'hui son histoire.

Constituer des collections

Si pour les collections archéologiques la démarche à suivre ne posera pas de problèmes insurmontables pour la constitution du fonds (l'ICRROM assure depuis plusieurs années une formation scientifique et technique à la conservation des biens archéologiques), pour les autres sections du musée tout reste à faire.

Cette situation particulière laisse une grande liberté en ce qui concerne la méthode de récolte des pièces muséales pour raconter l'histoire du territoire de Preah Vihear d'avant l'arrivée des homme à aujourd'hui, de la géologie aux mythes. Sans faire l'économie des sources traditionnelles d'archives et de fonds muséaux ( situés essentiellement en France) ce musée sera une oeuvre collective réalisé essentiellement avec les populations qui vivent sur le territoire et ce dans un souhait de travail identitaire mais aussi de développement local dans un esprit de bonne gouvernance.

Le musée outils de gouvernance territoriale

Non seulement les collections ethnologiques vont être constituées à partir d'enquêtes sur le territoire faite avec et par ses habitants mais aussi le musée va être au centre d'un réseau de parcours et d'aménagement de lieux didactiques (jardins et fermes d'acclimatations) et de lieux découvertes et accueils pour s'imprégner de la connaissance du territoire. Le musée servira également à relancer certains aspects de l'économie locale (culture de plantes médicinales) voir de relancer des savoirs faire oublier (élevage de races de bovins locales, dressage des éléphants...)

Une incitation au développement touristique de la région

La région de Preah Vihear n’est actuellement visitée que par de très rares touristes étrangers qui y accèdent par la Thaïlande et par quelques visiteurs qui s’y rendent en pèlerinage, car c’est l’un des principaux sites dédiés au Dieu Shiva du Sud Est Asiatique

L’idée originale est de travailler à la mise en valeur du site et de la région, et ce non seulement dans l’esprit d’un projet de préservation des éléments patrimoniaux bâtis et immatériels mais aussi dans l’esprit d’un projet nouveau pour le Cambodge celui d’un développement touristique durable.

Une étude est en cours pour réaliser en liaison avec le projet du musée et des parcours sur le territoire reliés au musée des équipements touristiques adaptés à la fois aux exigences d’un public international mais respectueux des usages de la région. Cette forme de tourisme permettrait également d’imaginer des parcours découverte de l’ensemble de la région et développer un artisanat ancestral et encourager les pratiques agri/pastorales traditionnelles..

D’autre part une volonté de développer un tourisme nationale est très importante pour les décideurs. Cette forme de tourisme s’inscrit dans une volonté de faire connaître le patrimoine nationale à une population qui est encore à la recherche de son identité suite aux traumatismes des années khmers rouges.

En conclusion

L'expérience participative de création du musée du territoire de Preah Vihear devrait permettre à cette région du Nord Ouest cambodgien particulièrement pauvre, de développer son niveau socio-économique et de devenir une zone touristiquement attractive pour qui souhaite visiter le pays en dehors du circuit des grands hôtels internationaux, en modernisant et adaptant aux standards internationaux les usages d'hospitalité locaux tout en créant des circuits thématiques comme la route de Shiva ( dans l'esprit de la route de St Jean de Compostel) entre Laos et Inde et dont Preah Vihear pourrait devenir l'une des étapes majeurs.

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Grégoris Marie-Thérèse, Maître de conférences, Université Lille 1 – Sciences et technologies

ESTIENNE Isabelle, Chargée de recherche et d’enseignement, ENSAP Lille

«Les musées de ville, pépinières d’activités pour le tourisme culturel?»

L’offre muséale du Nord-Pas-de-Calais regroupe une trentaine de musées labellisés de France. Celle-ci s’est profondément rénovée depuis les années 1990 par des transformations et des créations d’établissements dans les principales villes, de taille moyenne ou métropolitaine. Cette modernisation de l’offre muséale impulsée par des politiques de démocratisation culturelle apparaît comme une étape, à laquelle succèdent aujourd’hui de nouveaux enjeux, dont celui de répondre aux attentes des touristes. Celles-ci sont clairement affichées dans les dernières ouvertures: la Cité de la dentelle à Calais, le LAM à Villeneuve d’Ascq, et dans le projet du Louvre-Lens. La mise en réseau des musées de la métropole lilloise tient aussi de cette démarche.

Une des conséquences de la modernisation et des politiques muséales est la multiplication des pratiques culturelles proposées dans ces lieux. Dans la communication que nous proposons le musée est présenté comme une pépinière d’activités culturelles. L’objectif est d’étudier les croisements possibles entre les pratiques présentées aux deux types de publics, urbains et touristes. Ils’agirait de vérifier l’hypothèse que l’organisation d’activités pour les publics urbains(les journées festives, les ateliers, les spectacles, les expositions spécialisées...) ait des impacts sur de nouvelles offres faites aux touristes. Par exemple, les savoir-faire acquis dans l’organisation d’ateliers pour de jeunes publics, se répercutent-t-ils sur les offres faites lors des grandes expositions? Les évènements festifs (Journées du patrimoine, Nuits des musées, festivals...) sont-ils des moments pour expérimenter de nouvelles actions touristiques? La mise en place de ces activités et la réception qui en est faite par les publics fait-elle émerger de nouvelles idées, de l’originalité, donc de la création de valeur en vue de répondre aux attentes éducatives et émotionnelles des touristes? Des enquêtes auprès des services chargés des publics des musées et auprès d’organisations de promotion et d’accueil du tourisme permettront d’étayer ces hypothèses.

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LEFORT Isabelle

Professeur de Géographie, Université de Lyon 2

«L’identité lyonnaiseau risque de ses musées»

La métropole lyonnaise a fait, durant les quinze dernières années et encore aujourd’hui, l’objet de projets multiples et d’ampleur très variable dans le domaine de la réhabilitation et/ou de la création de musées. Après le Palais Saint Pierre (musée des Beaux Arts), le musée Gadagne (musée d’histoire lyonnaise), le projet du Musée des Confluences vient en effet renforcer le positionnement lyonnais dans son offre touristique et muséale. Face à ce grand équipement culturel, dont les enjeux architecturaux et urbanistiques devraient servir d’icône et de point d’orgue au vaste périmètre de requalification de la presqu’île ( le plus grand chantier urbain lyonnais en cours), un autre projet est en phase de structuration, celui du pôle muséal de la soie (Croix Rousse essentiellement), dispositif sans commune mesure financière mais à forte valeur mémorielle et identitaire. Si l’on y adjoint le Musée Tony Garnier, musée urbain de plein air (dans sa quasi-totalité), la palette muséale lyonnaise dessine un territoire métropolitain exemplaire des problématiques soulevées par l’appel au colloque: enjeux dans la structuration de l’offre urbaine et touristique, dispositifs spatiaux d’élargissement et de dilatation des flux de l’hyper au péri-centre, geste architecturale iconique, montage d’acteurs et de financement multiples (de l’Etat aux associations).

La communication se propose d’analyser les fonctions muséales comme commutateur fort d’un tourisme urbain et métropolitain puisque l’émergence et l’affirmation de la destination touristique lyonnaise est concomitante aux travaux et projets mentionnés. Cette fonctionnalité d’interface tourisme/métropolisation, économiquement et symboliquement prégnante, au-delà de la diversification de l’offre et des stratégies de marketing territorial, du recours à des noms reconnus de la muséologie (M. Coté) met au jour des difficultés réelles de synergie et de partenariat (mise en réseau partielle par exemple) et plus encore des enjeux identitaires à l’échelle de la métropole. La transformation actuelle du paysage muséal lyonnais, en s’appuyant thématiquement sur ses marqueurs identitaires («Lyon et ses fleuves», «modernité» architecturale historiquement répétée de la Renaissance au XXIème siècle, histoire sociale…) peine à composer une offre muséale rénovée qui fasse territorialement «sens», alors même que la classification UNESCO s’appuie sur la cohérence historique de ces marqueurs.

LIGNON-DARMAILLAC Sophie

Maitre de Conférences-HDR en Géographie, Université Paris4-Sorbonne

«Des musées du vin aux Centres d’interprétation de la culture du vin, les nouveaux musées des grands vignobles européens, l’exemple de la France et de l’Espagne »

L’essor actuel de l’œnotourisme dans les vieux pays viticoles, engendre depuis une dizaine d’années, un véritable engouement pour la mise en scène de la culture du vin. A coté des musées dit «de référence», tels les musées d’Unterlinden à Colmar ou le musée du vin de Bourgogne à Beaune, de nouvelles offres muséales apparaissent, culturelles et ludiques. Non plus simples musées de la vigne et du vin, autrefois principalement orientés vers les travaux de la vigne et du vin, ces nouveaux musées s’ouvrent plus largement à la «culture du vin», universelle, et non plus cantonnée aux savoir-faire du vignoble local. Outres cette dimension nouvelle qui tend à situer la région viticole dont sont issus ces nouveaux musées, dans un cadre international de toute autre ampleur, ces centres sont autant de sites touristiques qui attirent un nombre de visiteurs bien plus important que les musées traditionnels. Conçus comme parcs de loisirs, comme centres interactifs, ils cherchent à attirer tout autant des familles avec enfants, que des séminaires d’entreprises, des touristes nationaux comme des touristes étrangers. Entre le Hameau du vin en Beaujolais, l’Imaginarium à Nuits-Saint-Georges, ou le musée de la culture du vin de la fondation Vivanco dans la Rioja, quel est le nouveau modèle muséal promu par le tourisme viticole? Pourquoi l’œnotourisme européen engendre t’il de tels centres ludiques et de loisirs? Quelles sont leurs fonctions, entre musée, tourisme et économie viticole? Quels liens étroits entretiennent ces musées et les caves de leur vignoble, ces musées et les grandes villes du vin, telles Beaune, Bordeaux ou Jerez de la Frontera? Comment ces musées deviennent ils, l’élément majeur de l’offre œnotouristique locale par leur renommée nationale, voire internationale? Comment l’initiation de la dégustation s’est elle substituée à la consommation à la cave, et comment inversement, l’art est il rentré plus que jamais dans les chais ou dans les vignes? L’œnotourisme, une dimension cachée de l’étude du musée, ou réciproquement, le centre d’interprétation de la culture du vin, comme moteur de l’économie viticole locale ou régionale, en temps de crise, redynamisée par la multifonctionnalité des nouveaux musées de la vigne et du vin?

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Morel-DeledalleMyriame

Conservateur en chef, Musées de Marseille

«Le musée, (ou le projet culturel) comme outil médiatique et politique?»

Sur les points musée-«starchitecture» et musée- point d’appui de développement touristique, il me paraît important de regarder de près (avec des exemples précis que je prendrai dans mon expérience marseillaise), le rôle primordial et décisif du Politique, de l’Elu et de son entourage (et du Financier dans son sillage).

Il est moins, ici, question de«culture/patrimoine» que de «spectacle», il est moins question d’étude et d’analyse que de «recette qui marche».

Dans l’esprit du Politique, la recette du Guggenheim-Bilbao est reproductible, tout au moins pour l’effet d’annonce.

Il n’est qu’à lire Le Monde du 29 juin et du 3 juillet 2010 pour y trouver dans l’un, un article sur le nouveau musée d’Arles, dont le contenu est évacué au profit du projet de l’architecte – Franck Gehry- dont la photographie illustre le texte, dans l’autre un article sur l’agrandissement du musée d’Art et d’Histoire de Genève: sont essentiellement mis en scène le mécène et l’architecte – Jean Nouvel-, la faveur de la photographie illustrant le texte étant réservée, cette fois, au mécène – qui se flatte, dans ses propos, d’avoir convaincu l’architecte du bien-fondé de sa proposition muséographique…! et si le conservateur et les collections dont il est le garant, sont ici évoqués, c’est bien en raison de la personnalité du personnage qui a probablement su cadrer cet article.

Certes, nous sommes dans un texte «journalistique» et non professionnel, mais le contexte des «nouveaux musées, ères urbaines et mobilités touristiques» passe désormais par les médias. Ils sont incontournables du politique et du décisionnel.

Dans la perspective de l’événement «Marseille-Provence Capitale européenne de la Culture 2013» dont Marseille attend beaucoup pour ancrer sa mutation urbaine et réorienter son économie (vers le tourisme entre autres) , le projet-phare est celui d’un musée qui n’en finit pas d’accoucher et d’être remis en question (le MuCEM) .

La certitude sur laquelle tous les politiques se sont mis d’accord est qu’il ouvrira pour 2013 – avec ou sans projet scientifique, - l’important étant qu’on tient l’architecte – Rudy Riciotti- et sa coquille vide. Un coup de ciseau au ruban, et l’affaire sera conclue, par un, des articles – qui feront l’événement.

Sur le fond (la nouvelle métropolisation, les perspectives économiques vers le tourisme), il se peut que ce geste joue un rôle, mais les choix ne sont pas véritablement fondés sur des analyses prospectives, des enquêtes socio-professionnelles, sur du travail, en somme.

Les choix résultent d’un cocktail de compromis politiques, de lobbies médiatiques, de strass et de paillettes… du duo «Communication versus Politique».

Et c’est naturel: le Politique, dont le mandat est court, ne peut penser qu’à des projets à court terme, éphémères, et mis en scène de façon spectaculaire. A son entourage de l’orienter autrement, à lui de savoir s’entourer pour envisager d’autres modes de fonctionnements dans de véritables projets de société.

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NICOLAS Amélie

Docteure en Sociologie

«Ni tout à fait musée, ni tout à fait espace public, les «Nefs de Loire» ou la singularité recherchée d’un projet culturel et touristique à Nantes»

Nantes, au tournant des années 1990-2000, se dote d’un projet urbain d’ampleur sur un territoire situé en bordure de centre-ville et jonché, dans sa partie ouest, de tout un ensemble de friches industrialo-portuaires. Le projet de l’île de Nantes s’attache alors à faire passer la ville dans le cercle des métropoles européennes en la dotant de tout un ensemble de fonctions urbaines capables de la promouvoir à ce rang.

La réflexion autour des leviers potentiels de la transformation urbaine sur l’île de Nantes a mobilisé les élus jusqu'en 2002. La présence des constructeurs de machines fantastiques, qui ont marqué la ville dans les années 1990 autour de la troupe de théâtre de rue Royal de Luxe, est apparue comme une alternative originale. En effet, au regard des débats sur la pertinence d’un équipement-phare pour l’île de Nantes, l’implantation d’un musée accueilli dans un monument d’architecture contemporaine pouvait déjà paraître comme un standard de la régénération urbaine. La construction d'un éléphant mécanique de 11 m de haut, la capacité de ce pachyderme à se déployer dans l'espace public, la référence au populaire qu'il met en scène a finalement convaincu les élus nantais qui se sont alors détournés du musée. Le choix de l'éléphant aura permis la réhabilitation des anciennes Nefs de Loire à destination de la "gare de l'éléphant" et les visites de l'atelier des machines, aménagé sous ces mêmes nefs, font partie du spectacle ainsi présenté. Ce nouvel espace fait alors le lien entre un espace public dédié à la déambulation esthétique et au divertissement et le nouveau"quartier de la création", lieu de l’innovation culturelle et artistique "à la nantaise" capable d’impulser une dynamique économique autour des industries dites créatives. La souplesse de la programmation culturelle et artistique à laquelle s'ajoute une ambiance urbaine particulière et travaillée comme telle doivent alors permettre d'attirer tout autant une large frange de la population nantaise que des visiteurs occasionnels, milieux d'affaires ou congressistes en visite, scolaires en déplacement, touristes venus d'ailleurs. Les Nefs sont elles-mêmes au coeur d'une offre culturelle et touristique plus large, confortant ainsi la visée métropolitaine Nantes-Saint-Nazaire. La récente nomination de Jean Blaise, directeur de la scène nationale du Lieu Unique et inspirateur de la Biennale Estuaire 2007-2009-2012, à la direction de la SEM Nantes Culture et Patrimoine qui gère les Machines de l'Ile, les Nefs et le Musée d'histoire de la Ville et à la direction de l'Office du Tourisme témoigne de ce rapprochement entre culture, art, patrimoine et économie touristique.